J'ai appelé ma maman ce soir, comme tous les weekends (ou presque) et dans notre conversation palpitante sur le beau temps et le reste, elle m'a parlé d'une femme qui j'ai rencontré il y a deux ou trois ans. C'est la femme du fils de l'ancien patron de ma mère (vous suivez?); j'ai le même âge que ce 'garçon'; on était au collège ensemble. Nous n'étions pas vraiment amis, mais des connaissances. Il est maintenant un médecin brillant (il est invité partout dans le monde pour faire des conférences, pour vous dire). Il y a deux ou trois ans, comme je disais, il est passé par Paris avec sa femme et leur deux enfants. Prévenue par ma mère, je les ai invité pour un déjeuner de dimanche.
C'était le sorte de repas 'obligatoire' que je dois faire de temps en temps pour accueillir mes compatriotes qui passent par là, amis ou pas, amis d'amis souvent. Je le fais parce que c'est 'gentille', parce que l'on attend de ma part. Ils étaient tous très sympas. Le repas a dû plutôt bien se passer; je n'ai pas vraiment gardé de souvenir.
J'avais de temps en temps de leurs nouvelles, grâce à ma mère, pas parce que j'avais demandé, mais parce qu'elle pensait que je voudrais sûrement en avoir.
La femme de ce garçon était malade quand je l'ai rencontrée. Ma mère m'avait prévenu. Elle souffrait d'une maladie rare (auto-immune) qui s'appelle (en anglais) scleroderma. Plus ou moins, c'est quand tous les tissus du corps durcissent petit à petit au point d'avoir la peau et les organes complètement durs et ainsi mourir. Ainsi avertie, je me souviens juste d'avoir regardé la femme un peu longuement pour voir si je voyais les effets. Elle paraîssait un peu trop ridée pour son âge, mais à part ça, rien.
Au téléphone ce soir, ma mère m'a dit qu'elle avait eu des nouvelles inquiétantes comme quoi la femme a dû aller en hospice et que la fin n'était pas loin. Apparemment elle avait commencé un blog; ma mère ne se souvenait pas très bien comment ça s'appelle. Toujours au téléphone, j'ai rapidement googlé les quelques mots clés que Maman a pu me donner. Je suis tombée tout de suite sur son blog, et le post annonçant son décès d'hier.
Depuis, je pense beaucoup à cette femme, son mari, leurs enfants. Depuis des années, elle savait qu'elle allait mourir jeune. Son mari le savait même avant de lui demander sa main. Evidemment je ne sais pas ce que ça fait. J'ai lu pas mal de son blog ce soir, et je vous invite à le faire, même si vous ne comprenez pas tout (évidemment, c'est en anglais). C'est ... tellement fort. Et ce qui me dérange beaucoup, c'est que je vois les dates des ses derniers posts, quand elle savait la fin si proche. C'était cette semaine, la semaine dernière, le mois dernier. Et moi, quand elle vivait tout ça, je faisais quoi? Je pîquais des crises parce que la maison n'était pas bien rangée. Je stressais parce que je n'avais pas fini une commande à temps. Je grondais mes enfants pour des bêtises. Et je maudissait mon mari pour sa manque de sérieux dans les domaines que je trouve 'sérieux'.
Bref, cet évenement, qui n'a rien du tout à voir avec moi, me fait mettre les choses un peu en perspective. Cette femme a réussi à voir l'essentiel dans la vie, et j'aimerais faire pareil. Là, je n'arrête pas de pleurer (mon mari est au lit, donc je peux, sinon il ne supporte pas -- c'est un signe de faiblesse voir d'instabilité mentale, à ses yeux). Mais pour moi, ça fait du bien. Je pleure pour cette famille qui a perdu quelqu'un d'extraordinaire. Je pleure parce que deux enfants et un mari vont avoir des jours très difficiles à venir. Je pleure aussi parce que cette femme a l'air d'avoir trouvé quelquechose que je souhaite encore trouver, mais que je désèspère de trouver. Et je pleure parce que je me sens nul de me laisser détourner des choses essentielles par les choses si peu importantes.
Donc, non, je n'ai pas mis à jour la boutique en ligne. Vous ne trouverez point de nouveautés ce soir. J'ai préféré pleurer devant mon ordi, et je me sens ... nulle.
Non, tu n'es pas nulle! Je n'ai pas encore eu le courage d'aller voir le blog de cette maman.
Tu ne peux pas t'en vouloir de ne pas avoir eu le même parcours qu'elle. Finalement ça reviendrait à culpabiliser de ne pas être malade.
Elle ne pouvait pas avoir la même vision de la vie que nous, qui ne savons pas obligatoirement quand nous allons mourir. Nous sommes humains, et avons la liberté (et le besoin?) de nous exaspérer contre des choses du quotidien, ça aussi ça fait partie de la vie. Le tout parfois (c'est ce que j'essaye de faire, car je suis une "grande énervée"), c'est de savoir reconnaître quand on s'est énervée à tort, et de demander pardon...
Quand aux larmes, c'est une chance de savoir pleurer, je suis une "pleureuse née", et mes larmes sont la soupape quand la pression monte. Au début de notre rencontre avec mon mari, il me demandait "mais pourquoi tu pleures?", j'essayais de lui trouver une réponse. Maintenant, il sait que parfois c'est un besoin, et non pas un défaut. Je suis quelqu'un d'assez dur dans la vie. Et pourtant je pleure beaucoup. Je me cache un peu plus pour "pleurer tranquillement", et jamais devant les enfants (c'est vrai que nos hommes détestent nous "sentir" faibles).
Quand je suis énervée, trop énervée, j'entends la voix de ma grand-mère quand on avait fait une bêtise, "c'est pas grave, rien n'est grave..."
Rédigé par : Camille | 13 octobre 2008 à 10:25
tu ne l'es pas. on est tous fragiles face à la maladie et à la mort.
on a le droit d'avoir peur, ou bien de simples faiblesses, des doutes, le sentiment de ne pas avoir trouvé la sérénité,
c'est humain.
tout simplement, HUMAIN.
ma tante est atteinte, de la maladie de charcot.
en langage de doc internatieueueuenâl, c'est la S.L.A.
un an que ça lui a été diagnostiqué.
elle a perdu plus de 20 kilos.
est sous assistance respiratoire.
elle part.
elle a réclamé à voir gabrielle cet après-midi, alors je pleure avant, après, et parfois avec elle,
après, ce sera trop tard.
ça me touche beaucoup ce que tu as écrit.
et, non, tu n'es pas nulle.
bisous tendres, et merci pour gabrielle
Rédigé par : Rosine | 13 octobre 2008 à 10:26
tous les jours je vais voir mon papa à l'hopital mignot pas loin de chez toi ! je ne me sens pas nulle parce que je pleure ! je ne me suis pas sentie nulle quand en janvier je suis passée te voir et que je rentrais de l'enterrement de mon ami-mon frère, je ne me suis pas sentie nulle fasse à cette culpabilité quand en juillet le papa de mes enfants c'est suicidé !.... je te promets de passer te voir depuis le temps que je le dis, même si nous ne nous connaissons pas je me permets de te tutoyer et de t'embrasser. jeanne
Rédigé par : jeanne | 13 octobre 2008 à 11:06
Bonjour Allison,
comme les deux personnes précédentes, je dis que tu n'es pas nulle. Comment pouvais tu savoir? Malheureusement c'est la vie.
Nous avons tous dans notre entourage, des personnes qui sont malades, plus ou moins touchées.
Quand parfois, nous nous rendons compte que nous ralons pour le quotidien (une bêtise, un retard, un manque de compréhension de la part du conjoint), bien sur nous avons le droit de raler, mais le tout après est de s'en rendre compte et de pardonner. Moi aussi je m'énerve parfois contre mon fils qui n'en fait qu'à sa tête, mon mari qui laisse trainer ses chaussettes.... Mais nous avons le droit aussi!
Le fait de pleurer est tout à fait naturel, et justement, cela permet d'évacuer. j'ai trop longtemps garder des larmes au fond de moi, car il ne fallait pas pleurer me disait ma mère, ne pas laisser transparaitre les émotions. Et bien en grandissant je me suis rendue compte que cela n'était pas bon, car tôt ou tard cela ressort, et encore plus fort. N'ayez pas honte de lâcher ce qu'il y a au fond de vous, cela fait un bien fou.
Amicalement.
Frédérique
Rédigé par : Frederique | 13 octobre 2008 à 11:08
Et ce n'est pas nul d'oser parler de ce que l'on considère comme nos faiblesses, nos hontes, nos échecs, toutes nos innombrables et inévitables imperfections, c'est au contraire courageux et louable: ne rien dire, faire semblant de rien, ne pas être touché, ça, ce serait nul, non?
Rédigé par : Akä | 13 octobre 2008 à 11:58
Allison je t´embrasse ... a demain.
Rédigé par : lila rose | 13 octobre 2008 à 13:50
J'ai commencé à lire le blog de Michelle, et... quelle claque ! Quelle force !!!
S'il y a bien une preuve de plus que tu n'es pas nulle, c'est justement que tu nous parles de cette femme, que tu nous donnes le lien vers son blog. Parce qu'à ton tour, tu nous donnes l'occasion de regarder la chance qui est la nôtre...
Merci Allison et mille bises !
Rédigé par : Fifi | 13 octobre 2008 à 17:40
Allison nulle, c'est toujours etonnant comme les gens les plus gentils, charmants et humains peuvent se défavoriser.
Allison tu es humaine, et de pleurer et plutôt un grand signe de vie, on ne peut pas vivre sans rire mais on ne peut pas vivre bien sans pleurer de temps en temps afin d'évacuer le stress, l'angoisse, les pensées négatives...
Je t'embrasses bien fort
Rédigé par : Anne-Christelle | 13 octobre 2008 à 20:20
Well OK, you're hopeless or stupid or whatever. So am I. And I'm feeling ashamed for attaching importance to unimportant things and I'm crying too...
Rédigé par : lunemalo | 13 octobre 2008 à 21:29
peut-être qu'il faut vivre et rire et s'attacher à des futilités pour ceux qui sont trop embourbés dans la souffrance et aimeraient que leur vie soit légère? pour leur montrer que la vie est encore autour d'eux même s'ils sont sur le chemin du départ?
je ne sais pas, c'est peut-être choquant ce que je t'écris là maintenant... mais j'ai travaillé en soins palliatifs, et j'ai remarqué qu'il fallait être dans la vie pour accompagner du mieux possible l'autre dans la mort.
et ça n'empêche pas de pleurer aussi...
à bientôt allison
Rédigé par : dday | 13 octobre 2008 à 23:04
Bonjour Allison,
Touchée et humaine, il n' y a pas de mal à ça... C'est aussi ce qui pimente nos vies...
Rédigé par : Sophie | 14 octobre 2008 à 17:32
ces moments là,malheureusement on en a besoin pour prendre un peu de recul, faire le point, sortir de la tourmente de la vie et faire un break même d'un soir-)
Rédigé par : karine | 14 octobre 2008 à 21:05
j'ai beaucoup de retard et plus rien à rajouter, mais je t'embrasse bien fort! sacré Allison...
Rédigé par : inès | 16 octobre 2008 à 15:02
et bien...au départ j'étais venue admirer tes cols/écharpes(si tu me le permets) et là je me retrouve à lire la suite et je suis émue.
Je ne vais pas être originale, tu n'es pas nulle d'abord, et ces "choses non primordiales" dont tu parles, font partie de nos vies à tous et toutes comme l'est la naissance et la mort...tu vis, je vis, elle a vécu et en attendant(le plus tard possible hein!!!!) je nous souhaite à tous de vivre heureux, avec la santé et de profiter de tous les moments avec ou sans "futilités", en 1 ans j'ai perdu ma chère grand-mère et mon père, ça réveille...et continue d'engueuler ton mari et enfants! moi je continuerais à engueuler chat et mari!ainsi va la vie!
Bizzz
Rédigé par : Ketty | 16 octobre 2008 à 16:54
bonjour, je découvre ton blog et ta boutique aujourd hui grâce à ma copine Rosine!
je pense que cette" prise de conscience" est inévitable et même très humaine!
j'ai appris il y'a peu que les jumeaux (nés cet été) d'une de mes connaisances, sont atteint d'une leucémie! des bébés de 5 mois!!!!
j'en aurai pleuré tellement ça m'a fait un choc et tellement j'ai de la peine pour eux!
cela relativise bcp notre quotidien et depuis je ne me plains plus lors de nuits sans sommeil à cause de mes enfants!
Tu as une jolie famille, un mari qui surement t'aime bcp!
profite de chaque instant, nous ne sommes pas éternels mais ne culpabilise pas pour tes petits faux pas.....
bises
Rédigé par : thaoser | 18 octobre 2008 à 11:10
A cet instant, suis-je réellement nulle d'avoir cette larme au coin de l'oeil en lisant ces lignes ??
Très touchant...
Rédigé par : christine | 19 octobre 2008 à 00:03